Pie Franco : la présence française dans l’élaboration du vin chilien

Pie franc, un nom polysémique, qui mérite qu’on s’y arrête un instant.  

Il s’agit littéralement de la vigne cultivée directement en terre, sans médiation, sans greffe. Il s’agit donc d’un clin d’œil à un moment de l’histoire du vin, lorsque les vignes européennes ont été anéanties par le phylloxéra et que celles du Nouveau Monde sont revenues en Europe pour sauver la viticulture, mais qui a également donné lieu à des exodes, des voyages et des migrations de vignerons français pour commencer une expérience avec la terre de ce côté-ci de l’océan. 

Image de ce qui est enraciné directement dans la terre et en même temps partie de notre histoire commune : c’est le nom que nous avons choisi pour ce projet et pour laisser libre cours à votre imagination. 

En 2021, l’Institut français a créé le projet Pied franc avec Chile País de Vino, peut-être l’épisode le plus innovant de sa programmation culturelle dans la période post-pandémique. Lors de cette première édition, l’objectif était de souligner la validité et la richesse des liens culturels entre la France et le Chili. Un projet éminemment hexagonal, structuré autour de six régions, six cépages, six vignerons et surtout six concepts : terroir, cépage, barrique, œnologie, culture, appellation d’origine.

Pour cette deuxième édition, avec le même objectif, nous avons réalisé une série d’entretiens avec les personnes suivantes les six producteurs de cette sélection réservée. Ismael Prieto a poursuivi sa quête inlassable pour nous faire partager des projets viticoles qui sont un véritable reflet de la diversité des entreprises qui jettent un pont entre les cultures française et chilienne. Il a été rejoint par Danilo Petrovich, un anthropologue, dont la connaissance fine du monde rural et de ses cultures a donné aux entretiens une orientation nettement tellurique.

Cependant, le fil conducteur des rencontres avec les producteurs a changé : c’est le temps.

temps. Notion à multiples facettes, le temps semble intimement lié au vin dans toutes ses étapes. De l’âge des vignes au temps de vieillissement, les entretiens mettent surtout en évidence le temps qu’il a fallu à chacun des vignerons pour comprendre la vigne ; les années d’essais et d’erreurs pour lire le meilleur moment pour récolter, pour contrôler le moment de la vinification, et aussi pour être surpris par ce que l’assemblage exprime, surtout aujourd’hui en période de changement climatique.

En lisant les interviews, on comprend que le vin, c’est avant tout le temps d’apprendre, d’écouter les battements de cœur de la nature et du terroir, de récolter, de macérer, de conserver, de mettre en bouteille, de stocker et de déboucher. Car s’il y a bien une chose que Pie Franco sait faire, c’est partager.

Coda : Par hasard, la devise de l’Institut français à l’époque du premier Pied franc était “Vivre les cultures / Living cultures”, un slogan qui nous accompagne depuis des années. Depuis quelques mois, la nouvelle devise de l’Institut français est “Liberté, créativité, diversité / Freedom, creativity, diversity”, et je pense que Pied franc II reflète parfaitement cette triade.

Christian Estrade
Directeur de l’Institut français du Chili

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